samedi 18 avril 2009

Marseille

I
Aube à Notre-Dame de la Garde


Le visage lavé par une eau glaciale que portait le vent,
les yeux pleins de larmes,
la poitrine pleine de froid,
je vis naître les îles tremblantes de blancheur,
posées sur une mer grise.

Des caps s'avancèrent au loin
et, au milieu de l'archipel,
derrière une dernière brume transparente;
un voilier à l'ancre se balança dans l'aurore
comme s'il n'y avait jamais eu de nuit.

II
Pinède froide


Espace nu, au nord,
planté de grands pins solitaires
derrière le Château Borély.

Et ces longues années de jeunesse ombrageuse qu'il fallait nourrir de rêves.
Sur la mer proche, mais inaccessible, le soleil ne se levait pas.
Le vent en hiver était rude.

Quelqu'ancienne divinité des bois
survivait, sans doute,
traquée et sans avenir,
dans cette sévérité désolée.

III
Pluie d'été


Il pleut sur Malmousque
sur le Château d'If, sur les îles,
entre les maisons, dans les calanques,
et sur les costumes de bain
qui devaient sécher au balcon
à côté des géraniums.

Il pleut sur Malmousque ;
ça a commencé avant l'aube :
ce crépitement que ne fait le soleil.

Et c'est d'une tristesse assez délicieuse,
avec cette odeur de mer mouillée,
ce qu'on aurait dû faire et qu'on ne fera pas.

Tous projets abolis, dans la pauvre lumière
et la prison de l'eau du ciel,
naît une espèce de liberté intérieure
mollement désirée.

IV
Lassitude de l'été


Ah ! revienne l'automne, et revienne l'hiver,
la mer déserte et grise
avec ses îles nues
et les nuages qui se déplacent
dans un ciel sans éclat.

Louis Brauquier

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