lundi 24 septembre 2007

au hasard des rencontres # 10


voici comment j'ai raconté l'histoire de cet autographe ailleurs...
lors de son dernier passage à paris, la dame donnait une série de récitals au franc pinot, une garguotte jazzesque de l'île st louis... sincèrement, le matin même quand la voix dans le poste annonça l'évènement, je pensais qu'elle se trompait, que la dame s'était éteinte dans les années 70... ni une, ni deux... j'étais donc sur place le soir même... malgré mes jambes, malgré tout...
anita était très âgée et enrhumée jusqu'aux oreilles... elle était encore belle malgré les outrages du temps...
sur un cruel écran, un vidéo-projecteur diffusait des images de sa folle jeunesse... "she's not on drugs anymore" crut bon de me dire sa follasse de producteur sur un ton égrillard avec un éclat désagréable dans l'oeil... elle était assise à mes côtés sur un tabouret de bar et regardait ces films d'un autre âge comme si elle les découvrait...
elle me demanda une serviette en papier que je m'empressai de lui procurer pour qu'elle y tamponne ses lèvres fraîchement ripolinées... elle me tendit les bras pour que je l'aide à descendre du tabouret... je la pris donc à bras le corps pour soulever la frêle silhouette et la déposer délicatement sur le sol trop bas... elle me remercia et me pria de récupérer le tabouret auquel mon billet ne me donnait pas le droit... son geste me bouleversa, sur son visage, les traits de ma grand mère récemment disparue s'imprimèrent et les larmes affluèrent...
c'est donc ainsi que je pris anita o'day dans mes bras...
inutile de dire que la serviette en papier avec les traces des lèvres de la dame est soigneusement protégée par un petit cadre ikéa avec le billet d'entrée...
le concert ? inexistant, hélas. mais quelle importance ? elle n'avait plus rien à prouver... peut être juste des fonds à réunir pour une énième opération... sous son smoking masculin cravatée de noir, elle dissimulait un corps à la dérive... sa tête ne devait pas être bien loin...
à une jeune et jolie chanteuse lui demandant un autographe à la fin du concert, elle rédigea un touchant "anita o'anita" d'une main gauche hésitante... j'ai eu plus de chance sur ma superbe pochette de "incomparrable !" (où elle affronte crânement la caméra) dont elle ne se souvenait plus et dont elle lut avec intérêt la playlist...
je rentrai donc sur la rive droite avec la charmante chanteuse à qui j'offris mon adresse dont elle ne fit jamais usage... elle dût, comme tant d'autres, se méprendre sur mes intentions... évidemment, elle ne pouvait pas savoir...

believe it or not, mais ce graffiti, ce tag, c'est l'autographe de lou reed...























dans la nébuleuse velvetienne, moe tucker... parfois je me dis que sa sonorité brute et sans fioriture était à l'origine du son du velvet... son essence même...

3 commentaires:

Philippe L a dit…

Merci encore…

pepito a dit…

merci à toi.
et je suis très sérieux... surtout aujourd'hui... quelque part, une "amitié" s'est effondrée... alors le moindre signe d'amitié, la moindre tendresse est plus que bienvenue...

pepito a dit…

pour ceux qui voudraient se faire une idée du concert d'anita o'day : youtube : anita o'day franc pinot